CETTE
ANNEE LA : Revivez
les principaux événements de ces
années là. Sport, actualité,
cinéma, musique et bien entendu moto. De nombreuses
photos, liens vers des sites, documents
d'époque.
Michel Montange est un cas à part dans
le monde la moto et de la presse moto. Avant de suivre
le parcours de celui que sa maman appellera bien vite
« Micou » pour le différencier des nombreux Michel nés
ces années-là (Michel Simon, Michel Jazy, Michel
Debré, Michelle Torr – humour !), sachez que le Micou
est un motard d’une espèce peu en vogue dans la
seconde partie du 20ème siècle. Il fait
partie d’une secte préférant
les petites cylindrées et
la balade aux gros cubes et à la poignée dans le
coin ! Et oui… D’où un certain décalage avec
l’ambiance prévalant par exemple dans les couloirs de
Moto Journal dans les années 70. Micou en a été l’un
des piliers pendant plus de 20 ans. Quand nous
partions en essai dit « comparatif », vous retrouviez
devant les as de la zone rouge dont Momo (Éric
Maurice) et votre serviteur (j’les avais tous à ma
pogne), tout de suite derrière Christian Lacombe qui,
mine de rien, traçait fort, un peu après Didier Ganneau (ingénieur ayant dévié, donc fréquentable),
François-Marie Dumas (dit FMD), Paul Salvaire et
d’autres qui roulaient bien et enfin deux artistes du
guidon : Bussillet et Micou. Disons que Bubu
décomposait sa conduite style « je freine, je penche
la moto, je vais au point de corde, je regarde la
sortie du virage, je tourne la poignée, super, j’y
suis arrivé ». Micou, lui, se promenait. C’est le seul
type au monde qui peut rouler en regardant en l’air !
Normalement on se plante en faisant ça. Lui, non. Et
quand vous le croisiez dans un couloir de MJ, le temps
qu’il vous explique ce qu’il était en train de faire,
vous pouviez enfiler la combine de pluie et vérifier
les niveaux. Mais c’était toujours très intéressant.
Voilà l’une des facettes du personnage qu’est Michel
Montange.
Revenons-en au petit Michel. Sa famille
émigre de Montreuil (neuf-trois), à Joinville-le-Pont
(pon-pon, neuf-quatre) en 1952. Son échec (de peu) au
bachot (dénomination antique du baccalauréat), après
une scolarité
hasardeuse et ponctuée de changements
d’établissements pour incompatibilité calme mais
affirmée avec les études, pousse sa mère, qui avait
visiblement cadré son fiston, à l’inscrire à une école
de photographie. Le petit Micou a donc désormais un
objectif (warf) dans la vie. Cette passion s’ajoute à
celle de la moto qu’il assume depuis 1965. Vous
noterez que cela fait deux passions, moto et photo,
bref une histoire d’O. Apparemment rêveur, l’ado trace
sa vie. Son inscription dans un club comptant
plusieurs pilotes et sa rencontre avec le clan de
Gérard Jumeaux, un autre Joinvillais venu lui aussi de
Montreuil, feront le reste. Le frère de Micou sera
d’ailleurs le premier passager du célèbre sidecariste.
Michel évolue ainsi tout de suite dans le milieu de la
compétition.
Sa première photo, prise avec le
célèbre appareil Rolleiflex 6x6, est publiée en 1969
dans le mensuel « Les Motards » de Jean-Pierre Drexler.
Micou se souvient que Drexler faisait son journal
« dans sa salle de bain », et distribuait lui-même
quelques exemplaires chez les motocistes pour
augmenter les ventes. J-P. Drexler s’est tué à
Montlhéry la même année.
Michel Montange se balade déjà pas mal
pour suivre des courses de moto (mais pas les GP) en
Angleterre notamment. À son retour de l’armée, Micou
retrouve chez l’éditeur Michel Hommel deux anciens des
« Motards », Christian Venant et François Beau. Il
intègre l’équipe qui va sortir le premier numéro du
mensuel « La Moto » (janvier 1970). C’est son premier vrai
travail de journaliste. Il est donc
pigiste » (travaillant sur commande et payé à la
tâche) à La Moto mais aussi à Automoto, l’ancêtre de
Moto Journal (1970 toujours).
En 1972, une équipe de pigistes crée
Sport Moto ; Jacques Bussillet, François Beau, Micou… Journal qui,
dans sa première version, va capoter un an après.
Micou fait alors la connaissance de
Phil Berthelin et de la « bande de la vieille maison »
à Montrouge (neuf-deux). Il laisse quelque peu tomber
la photo et sort l’aérographe pour peindre motos et
casques pour nombre de pilotes : la 900 Bol d’Or
d’Husson vainqueur du Tour de France, le casque et la
750 H2R de Fau, la 750 TZ de Rigal (et « ses p… de
losanges » précise MM !), le casque de Chemarin, les
motos de Fernandez, Huguet, Yves Mourousi, etc.
Au fil des ans, la bande de Montrouge
se disperse. Micou reprend alors son appareil photo et
frappe à la porte de Moto Journal. En pigiste
régulier, il couvre surtout l’enduro et participe à de
nombreux essais. Il ne sera à plein temps à MJ qu’à
partir de 1985 (commentaire de MM : « À 37 ans, il
était temps que je me case… ».
Durant toute sa carrière (drôle de mot
pour lui), Michel Montange s’est fait régulièrement de
grands plaisirs avec plusieurs participations au Dakar
(dont le premier), des essais dans le monde entier,
des photos par milliers et une collection d’une
vingtaine de trails. Et début 2009, c’est la retraite,
poussé par l’administration d’un grand groupe qui a
évolué et au sein duquel il ne se reconnaît plus. Et
avec sa vie de bohême, il lui manque des trimestres…
La liberté a-t-elle toujours un prix ? (NDLR : Francis
Boutet ramasse les copies dans deux heures).
Le pseudo tranquille Micou est donc un
homme de passions (il y en a sûrement d’autres que
celles évoquées ici). Comme quoi, il ne faut pas se
fier, etc., etc. Arrêtons les lieux communs. Une
anecdote le résume bien : ayant abandonné à un Dakar,
il regagne la capitale sénégalaise … en train, avec
loco cafouilleuse et tout ce qui va avec ! Par
curiosité, par plaisir. Quand Bike70 vous dit
(cherchez bien) que dans ces années-là, quand on nous
disait de prendre à droite, on prenait à gauche, juste
pour voir… Micou, pour avoir pratiquer maintes fois
l’exercice, ne dira pas le contraire.
Une dernière réflexion. On a
l’impression que, s’il n’y avait que des hommes comme
Micou, il n’y aurait pas de guerre.
François GOMIS
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Questions/réponses
Tes 2 ou 3 meilleurs souvenirs
pro ?
Micou : Mon
premier voyage aux USA, Daytona 1980 pour Moto
1, le premier du nom. J'avais juste un billet
d'avion. J'ai squatté la moquette de la chambre
de François Beau une semaine et Patrick Pons
gagne !! Super. Au retour, les bureaux de Moto 1
étaient vides. Le numéro deux n'est jamais
sorti.
Avoir pu rouler sur pas mal de
circuits à l'occasion de présentations
presse. Même si j'y étais en tant que
photographe, j'ai souvent eu la possibilité de
rouler aussi. Sepang, Sha Alam, Suzuka, Jerez,
Barcelone, Misano et la plupart des circuits
français.
Avoir fait un tour du circuit
de Charade en passager de Barry Sheene sur une
350 Yamaha (de route). Je faisais l'essai de la
moto pour Sport Moto en 1972. Bubu (Jacques
Bussillet) connaissait Barry et lui a demandé de
faire des photos sur la moto. Il a accepté sans
hésiter. (Le circuit de Charade était une route
ouverte en dehors de la course).
Ton plus mauvais souvenir pro ?
Micou : juste
quelques moments où c'était moins sympa que
d'habitude, mais j'ai la chance de ne pas avoir
de mauvais souvenirs. Il faut dire que je ne
suis pas rancunier, que je suis plutôt fataliste
et que je n'ai pas bonne mémoire.
Essais Moto Journal (MJ), tes
motos préférées et celles que tu n'a pas aimées
?
Micou :
J'ai toujours préféré les trails
et, pendant pas mal d'années, le gros
comparatif de début d'année était un moment
fort pour la rédaction. Je déteste les
sportives en dehors d'un circuit. Une moto qui
t'oblige à baisser la tête et courber le dos,
c'est pas mon truc.
As-tu fait des photos de
compétition sur circuit ?
Micou :J'ai commencé par ça. Je suivais
les championnats de France de vitesse et
d'endurance (1969 - 1974 environ) Puis pour MJ,
j'ai suivi l'enduro (1978 - 1980 et +) Puis j'ai
été essentiellement photographe aux essais. J'ai
quand même été sur quelques courses de mondial Superbike pendant quelques années à l'époque Fogarty.
Le matériel photo que tu as
utilisé (des années 60 aux années 2000) ?
Micou : J'ai commencé avec des Pentax et
des petits téléobjectifs (mais on pouvait
quasiment avoir les pieds au bord de la piste).
J'ai eu un 400 mm Novoflex. Une sorte de tuyau
de poêle avec deux lentilles mais qui faisait
d'excellentes photos. J'achetais des bobines de
film 35 mm de 15 mètres et, dans le noir, je
les découpais et rembobinais dans de vieilles
cartouches. Ça coûtait moins cher. Je
développais mes films et tirais mes photos. Puis
je suis passé en Canon, A1 puis T90, et les EOS
argentiques. Les premiers numériques n'étaient
pas convaincants, mais sont rapidement devenus incontournables. On pouvait mitrailler sans
retenue par rapport aux films chers à l'achat
et au développement. J'y suis donc passé avec
Canon à l’EOS 20D puis 1D Mk2. Mon objectif
2,8/300 mm m'a suivi de l'argentique au
numérique, comme toutes mes autres optiques.
Ton boîtier et ton objectif
préférés ?
Micou : Mon dernier argentique, le Canon
Eos 3 pour ses performances et le confort de sa
visée. Avec le 2,8/300, c'est un sacré outil.
Maintenant, l'EOS 5D en 24 x 36 numérique avec
un 17 mm pour englober tout le paysage.
Le passage au numérique a-t-il
été un problème ?
Micou : Les premiers appareils n'étaient
pas performants et hors de prix mais on a vite
senti qu'il y avait un potentiel pratique. Il a
quand même fallu quelques années pour qu'on
puisse sortir une double page correcte avec un
numérique. Le problème actuel, c'est qu'on
n'envoie plus de photographe sur les Grand
Prix. Avec une agence, les photos sont en ligne
sur internet une heure après la course. Plus de
billet d'avion, d'hôtel, de développement de
film : les gestionnaires font des économies ...
mais on a les même photos que tout le monde.
Que conseille-tu comme matériel
aux motards photographes ?
Micou : Pour la
majorité des photos, les appareils compact ont
maintenant des possibilités excellentes. Si on
veut faire des photos d'action sur circuit ou de
ses copains sur route, il faut investir dans un
reflex et un télé zoom qui va jusque à 200 ou
même 300 mm. Les prix sont de plus en plus
abordables. Et puis il faut s'entrainer.
Heureusement, avec le numérique, ça ne coute pas
cher.
Quelle est ta photo de moto
préférée ?
Micou : Elle n'est pas de moi. Une des
photos de la grande époque des GP. Une photo de
François Beau à Assen. Agostini est devant mais
regarde par dessus son épaule à un freinage. Et
dans ses roues, il y a Hailwood sur sa Honda qui
le regarde droit dans les yeux. Avec le
Cromwell et les lunettes, on voyait le visage
des pilotes. On ressent la terrible pression d’Ago
qui a Hailwood à ses trousses.
As-tu une devise ?
Micou : Il y a
bien longtemps, j'avais peint sur mon
Cromwell :"Parle à mon cul, ma tête est dans le
désert". Depuis, j'ai été dans le désert et
j'accepte le dialogue.
Ton palmarès ?
Micou : Quelques courses en 50 cm3
en 1965 ma première année de permis. 2ème
au premier pas Dunlop (pour les licenciés de
moins de 18 ans), les 6h de la petite cylindrée
(un seul pilote), les 3 premières Croisières
vertes, les deux premiers Bol d'Herbe, les
trois premières 24 h de Bretagne (6ème
je crois pour la première, avec Audouard,
Breton et Hubert Auriol sur sa 400 HVA). Les 2
premiers rallyes de Tunisie (en tête du premier
le premier jour, casse de l'allumage le
lendemain) Les 4 premiers Paris Dakar. Dans les
dix pour le premier mais abandon à 2 jours de
la fin. J'ai été chaque année un peu moins loin !
Micou et François Gomis
La liste de tes motos de
collection ?
Micou : Yamaha 50 FT1, mini enduro 1972,
80 GT 1974, 125 DTE 1975, 125 DTF 1975, 175 DT
1975, 250 DT1 1969 (le premier trail japonais)
250 DT2 1972, 250 DT3 1973, 250 DTA 1974, 250 DT B 1975, 250 DT MX 1983, 360 RT1 1971, 360
RT2 1972, 360 DT A 1974, 400 DT B 1975, 400 DT
MX 1978, HONDA 50 XL, 125 SL 1975, 250 XL
1976, 250 MT Elsinore 1974 (le trail 2 temps pas
importé en Europe), Suzuki 400 TS 1975. En
Kawasaki, rien mais j’espère bientôt une 350 Big
Horn.